- Le Parlement de la Mer : un lieu privilégié autour des enjeux de la mer
Par Débat public La Mer en débat, le 14 Avril 2024
Le Parlement de la Mer : un lieu privilégié autour des enjeux de la mer
Présidé par Didier Codorniou, Vice-président de la Région Occitanie délégué à la Méditerranée, le Parlement de la Mer (PDLM), créé en 2013, est une instance de concertation de l’ensemble des usagers de la mer, structurée autour d’une Assemblée qui réunit 200 acteurs (élus, socioprofessionnels, associations, citoyens, fédérations et services de l’État). Le Bureau, dont l’activité est régulière, est composé de 25 membres, à parité homme- femme. C’est l’instance de décision du PDLM. Il valide notamment les travaux menés au sein de l’Assemblée au sein de différents groupes de travail.
Les citoyens (à parité homme- femme) sont intégrés à cette démarche inédite : deux siègent au bureau et une vingtaine dans l’assemblée. Ils sont issus du Forum du PDLM, ouvert à tous et qui rassemble plus de 1 500 personnes.
DES ACTIONS CONCRETES MENEES.
Le PDLM de la Région Occitanie joue un rôle d’instance, de concertation, de débat, de catalyseurs d’idées entre les différents usagers de la mer, tout en menant des actions concrètes à travers un programme annuel. Parmi les thèmes abordés : concertation éolienne, actions autour du patrimoine maritime matériel et immatériel, accessibilité des ports et des loisirs nautiques aux personnes en situation de handicap, formation et attractivité des métiers autour de l’économie bleue, acceptabilité de l’éolien en mer, féminisation des métiers maritimes...
Pendant le Covid, des visioconférences du PDLM ont permis à la Région Occitanie de faire bouger les lignes sur le retour d’une activité de plaisance dans les ports et une réouverture des plages. Le PDLM a également été à la manœuvre sur le premier schéma régional des dragages, ou encore sur l’évaluation du poids économique de l’économie bleue en Occitanie. Autant d’études structurantes pour donner des pistes d’actions à la Région.
UNE CHAMBRE D’ECHOS PRECIEUSE POUR LA REGION OCCITANIE.
Grâce à des délégations présentes activement sur des grands rendez-vous, comme les Assises de l’économie de la mer ou les Assises de la Pêche, le PDLM construit une notoriété et une reconnaissance de l’Occitanie en tant que région maritime. Un retard a été comblé face aux grandes régions maritimes comme la Bretagne notamment. En effet, avant 2013, la Région était culturellement moins tournée vers la mer.
« Le Parlement de la Mer - première instance de ce type à avoir été créée en France - sert de chambre d’échos à la Région Occitanie. Pour l’exécutif, c’est un moyen efficace de rester en prise avec ce que pensent les panels d’acteurs. Cela permet de faire évoluer les politiques publiques, en fonction des retours. »
- Didier Codorniou, Président du Parlement de la Mer
ÉOLIEN EN MER : ENTRE INQUIETUDES ET OPPORTUNITES
Le 18 janvier dernier, le PDLM a accueilli une journée de concertation du débat public « La mer en débat », sur le thème plus spécifique de l’éolien (co-usages dont pêche, innovation, tourisme et paysage). Avec, au final, des inquiétudes, des perspectives d’opportunités et des suggestions, résumées ci-dessous.
D’un côté, le manque de recul quant à l’impact sur l’environnement, les interrogations sur les prix de l’énergie éolienne comparée à d’autres types d’énergie, la crainte de conflits d’usages, la possible dénaturation de l’identité touristique des territoires littoraux, les problématiques liées à la sécurité au sein des parcs, peuvent être perçus comme des freins.
D’un autre côté, l’éolien en mer est un vecteur de souveraineté énergétique, de création d’emplois verts, d’innovation et de R&D, au service d’une nouvelle filière industrielle pouvant entraîner également des répercussions positives sur les activités économiques traditionnelles (effet réserve, tourisme industriel...).
LES INQUIETUDES EN BREF
- ✓ Conflits d’usages
- ✓ Pollution sonore
- ✓ Le temps sera-t-il suffisant entre les fermes pilotes et les fermes commerciales pour avoir un retour d’expérience sur l’impact sur la biodiversité (cétacés, avifaune, ichtyofaune) ?
- ✓ Y a-t-il des espèces maritimes plus touchées que d’autres par les parcs éoliens en mer ?
- ✓ Les effets d’attraction, récifs, protection, observés dans les réserves côtières, sont- ils vraiment transposables à un parc éolien qui contient une telle structure artificielle, avec des émissions de bruits, champs électromagnétiques ...
- ✓ Coupure de routes migratoires de poissons
- ✓ Impact sur la biodiversité marine
- ✓ Risque de nouvelles espèces invasive
- ✓ Quel démantèlement en fin de vie ?
- ✓ Protection des éoliennes contre l’électrolyse
- ✓ Intégration des co-usages au sein des parcs
- ✓ Perte d’espace pour la pêche et plaisance
- ✓ Comment gérer le risque d’affluence de bateaux de plaisance autour des champs d’éoliennes ?
- ✓ Quels types de pêches seront autorisés si les arts trainants sont interdits
- ✓ Zonage et surveillance des activités ausein des parcs si les co-usages sont autorisés
- ✓ Quelle anticipation de la cybersécurité des parcs ?
- ✓ Comment l’État va-t-il faire respecter les restrictions et les interdictions de navigation, et assurer la sécurité des parcs (accostages, terrorisme...) ?
LES OPPORTUNITES EN BREF
- Intérêt de développer l’éco-conception au sein de ces parcs (ancrage...) afin de renforcer la production halieutique
- Effet réserve des parcs éoliens
- Utilisation des flotteurs pour l’installation d’activités d’aquaculture (poissons, thon, algues, conchyliculture...)
- Pose de récifs artificiels sous les flotteurs
- Utilisation des flotteurs pour favoriser la productivité du milieu et pour l’étude des stocks d’espèces commerciales
- Développement des petits métiers de la pêche en cas de co-usage
- Création de réserves marines profitables à la biodiversité et aux pêcheurs à la périphérie
- Mise en place de ferme photovoltaïque dans les espaces interdits à la navigation des parcs ;
- Tourisme industriel (en mer et sur terre)
- Développement d’emplois et nouveaux métiers
- Formations liées à ces nouveaux métiers
- Développement des ports de commerce de Port-La Nouvelle et de Sète, autour de l’assemblage, du transport et de la maintenance des éoliennes offshore
- Les éoliennes peuvent devenir un lieu de rassemblement des compétences des professionnels, et une façon de sensibiliser le grand public aux énergies renouvelables
- Information des citoyens en temps réel de la quantité d’énergie verte produite
- Prévoir un retour de la fiscalité vers les territoires, et abonder un fonds pour l’accompagnement à la gestion du trait de côte et à la modernisation de la filière pêche (nouveaux bateaux, décarbonés...)
LES SUGGESTIONS EN BREF
- Mesures compensatoires pour les pêcheurs à établir (perte de capacité de la pêcherie du Golfe du Lion) ; ainsi qu’un dispositif financier permettant la décarbonation de la pêche
- Aides directes aux armements réellement impactés, en fonction des pertes de CA et des zones de pêches
- ✓ Aides collectives pour les entreprises de l’aval (perte d’apport en criée, perte d’emplois...)
- ✓ Concevoir des fermes éoliennes favorisant le déploiement de l’activité de pêche, par exemple par des couloirs de chalutage,
- ✓ Adaptationdel’outildetravaildespêcheurs pour la pratique de la pêche au sein du parc
- ✓ Accompagnement et soutien de la modernisation de l’outil de pêche
- ✓ Création d’un armement coopératif par les pêcheurs
- ✓ Réduction de la concentration des activités des éoliennes offshores en secteur proche de la côte
- ✓ Implantation des parcs le plus loin possible des côtes, hors des zones de pêche et de tourisme, pour éviter tout conflit d’usage
- ✓ Déterminer la part des parcs qui peut être dédiée à un effet de réserve, et la part qui peut être exploitée
- ✓ Tester des engins de pêche au sein des parcs
- ✓ Identifier en concertation avec les représentants professionnels des couloirs de navigation et des zones adaptés aux activités de pêche
- ✓ Anticiper au mieux les conflits d’usage
- ✓ Définir une réglementation pour la pêche aux arts dormants au sein du parc
- ✓ Recueillir des retours d’expérience à l’étranger
- ✓ Créer des établissements de nuit sur ces «îles artificielles », des sites artificiels de plongée ou encore de l’habitat insolite
- ✓ Installation de stations de rechargement des navires à propulsion électrique
- ✓ Produire de l’hydrogène directement dans les parcs d’éoliennes en mer ;
- ✓ Réduction du tarif d’électricité pour les pêcheurs$
ZONES DE PROTECTION FORTE : PRENDRE EN COMPTE LA SPECIFICITE DU LITTORAL D’OCCITANIE
Ce que dit le décret du 12 avril 2022 :
« Est reconnue comme zone de protection forte (ZPF) une zone géographique dans laquelle les pressions engendrées par les activités humaines susceptibles de compromettre la conservation des enjeux écologiques sont absentes, évitées, supprimées ou fortement limitées, et ce de manière pérenne, grâce à la mise en œuvre d'une protection foncière ou d'une réglementation adaptée, associée à un contrôle effectif des activités concernées.
Sont reconnus comme des ZPF les espaces maritimes compris dans les aires marines protégées listées ci-après, créées postérieurement à la date d'entrée en vigueur du présent décret :
- les cœurs de parcs nationaux
- les Zones de Protection renforcés et Zones de Protection intégrales des réserves naturelles
- les zones couvertes par un arrêté de protection.»
En 2022, la Méditerranée française comptait 52,3 % des Aires Marines Protégées, représentant 103.852 km2, mais peu d’entre elles répondent aux exigences de la protection forte.
Passer rapidement à des ZPF couvrant 5 587 km2 en Méditerranée française (soit presque 22 fois plus qu’aujourd’hui !), comme le souhaite l’État, est une source forte d’inquiétude pour les pêcheurs et les plaisanciers d’Occitanie. D’autant plus qu’avec seulement 4,75 km2*, l’Occitanie ne représente que 1,88 % des ZPF de Méditerranée.
Dans ce contexte, les ZPF doivent-elles atteindre 5 % du Golfe du Lion à l’horizon 2027, au lieu de 0,23 % aujourd’hui en Méditerranée française (à travers 35 zones déjà validées ou candidates) ? L’espace concerné est jugé très important, alors que le Golfe du Lion se caractérise par son étroitesse, sur quelque 17000 km2. Si la règle des 5 % s’y appliquait, il faudrait 850 km2 de ZPF.
* Cœur réserve de Banyuls : 0,65 km2, auxquels s’ajouteront 0,7 km2 quand l’extension sera effective ; Réserve du roc de Brescou à Agde : 3,1 km2 ; Cantonnement de pêche de Palavas- les-Flots : 1 km2.
LES PRECONISATIONS DU PDLM
Le PDLM est sensibilisé aux enjeux d’une meilleure protection environnementale de la mer. Exemples concrets : la campagne régionale « Faisons des MERveilles, pour une mer sans déchets », lancée en 2019, qui promeut le ramassage des plastiques ; Ou encore, le déploiement des zones de mouillage écologique, pour préserver les Posidonies.
De nombreux membres du PDLM considèrent en parallèle la mer comme le dernier espace de liberté. De fait, le travail sur la programmation des usages en mer et la spatialisation de la mer fait redouter à certains une perte de liberté.
L’une des possibilités, selon les acteurs de la pêche, est de combiner les ZPF avec les zones d’éoliennes en mer. Pour une ferme commerciale, il faut en effet compter 80 km2 par 500 MW. Donc, à l’horizon 2050, où entre 4 GW et 7,5 GW produits par les éoliennes en mer seront développés en Méditerranée ; les éoliennes se déploieront sur une superficie maritime comprise entre 720 et 1120 km2. Au total, avec les ZPF, on atteindra environ 2000 km2 surfaces, soit 12 % du Golfe du Lion !
En regardant le Plan de gestion West-Med, les pêcheurs ont par ailleurs des zones de fermetures spatio-temporelles de 5000 km2.
Ce qui amène donc, pour la pêche, à des zones d’exclusion qui frisent les 42 % de surface du golfe. D’où la volonté du PDLM de réfléchir à une superposition des zones d’éoliennes en mer combinées avec des ZPF, pour limiter la réduction de surface de perte de « liberté » ; notamment si la possibilité de réaliser des co-usages pêche au sein des parcs n’arrivait pas à voir le jour (sécurité, réglementation...).
Autre solution évoquée par le PDLM, le classement des zones de canyons sous-marins, intéressantes en termes de biodiversité et qui n’accueillent que très peu d’activités humaines. La perspective de la future extension de l’aire marine protégée d’Agde, qui demande à passer en réserve naturelle et pourrait passer à 600 hectares, pourrait grandement contribuer aux objectifs des ZPF.
« Dans le débat des ZPF, structurant pour l’avenir du littoral de l’Occitanie, l’édiction trop rapide de règles fortes interdirait des combinaisons. Le PDLM considère qu’il ne faut pas s’interdire de croiser les parcs éoliens en mer et les ZPF. Une fois qu’un parc est installé, il n’y a aucune raison de penser qu’il va dégrader le milieu. Une biodiversité et des espèces protégées vont s’y développer. La partie immergée des éoliennes, sera propice à la reproduction, à la biomasse et à la biodiversité. C’est déjà le rôle des réserves marines. »
- Parlement de la Mer
FOCUS
ÉCONOMIE BLEUE EN OCCITANIE : UN SECTEUR POURVOYEUR D’EMPLOIS, EN FORTE DYNAMIQUE
L’économie bleue englobe le nautisme et la plaisance, le tourisme littoral ; la gestion, la recherche, l’innovation et l’ingénierie ; le transport et les activités portuaires ; la valorisation et les ressources maritimes. Son poids s’intensifie en Occitanie.
Entreprises : 34 758 entreprises en 2022, au lieu de 31 557 en 2019 (+ 10 %).
Zoom sur les entreprises 100 % maritimes. 14 % des entreprises recensées en 2022, soit 4563 d’entre elles, sont totalement liées aux maritimes. 55 % (2482) relèvent des ressources marines, 40 % (1834) du nautisme et de la plaisance, et 5 % (247) des transports et activités portuaires.
Le nautisme se caractérise par une part importante d’associations, à travers la pratique sportive.
Emplois : 41 343 emplois en 2022, au lieu de 38 056 en 2019 (+ 8,6 %). Le tourisme balnéaire et littoral pèse le tiers des emplois touristiques et le quart du chiffre d’affaires touristique de l’Occitanie, avec 32 138 emplois (29 406 en 2019, + 9,3 %).
Détail par filières :
- 2 804 emplois dans le nautisme et la plaisance en 2022 (2019 : 2 629 + 6,7 %);
- 3 765 emplois dans la valorisation des ressources marines (2019 : 3 588 + 4,9%);
- 688 emplois dans les transports maritimes et les activités portuaires (2019 : 668 + 3 %)
- 1947 emplois dans la gestion, la recherche, l’innovation et l’ingénierie (2019: 1 765 + 10,3 %).
Chiffre d’affaires : 6,1 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2022, au lieu de 5,9 milliards en 2019 (+ 4,8 %).
Le tourisme balnéaire et littoral (hébergement, restauration, autres services et activités) pèse 4,62 milliards d’euros en 2022, là aussi en progression par rapport aux 4,35 milliards d’euros de 2019 (+ 6,2 %).
Poids respectif des autres activités :
✓ 770 M€ pour la valorisation des ressources marines (563 M€ pour le commerce et la transformation, 78 M€ pour la pêche en mer, 75 M€ pour la conchyliculture et l’aquaculture, 40 M€ pour la production de sel, 14 M€ pour les énergies marines).
✓ 550 M€ pour la filière nautisme et plaisance, en progression de 6,7 % (95 M€ pour les ports de plaisance, 370 M€ pour les industries et services, 75 M€ pour les sports et loisirs nautiques).
✓ 202 M€ pour la filière transports et activités portuaires, en redémarrage (+ 3 %) après la crise Covid : 25 M€ pour la gestion des ports, 20 M€ pour le transport de fret, 19 M€ pour le transport de passagers et 138 M€ pour les autres activités portuaires.
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